La Maison au bord de la mer by Élisabeth Vonarburg

La Maison au bord de la mer by Élisabeth Vonarburg

Auteur:Élisabeth Vonarburg [Vonarburg, Élisabeth]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Science-fiction
Éditeur: Alire
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


11 novembre 1982

Les Dents du dragon

Le fauteuil, aux courbes dépouillées quoique confortables, est placé de biais à deux mètres du lit, sous un spot de plafond à la lumière tamisée – mais dans la pénombre, l’effet est le même que celui d’un projecteur. Emmanuel Fromm s’y assied en silence, comme on l’en a instruit, tandis que l’assistant qui l’a accompagné va porter la petite boîte sur la table de nuit. Après les dimensions palatiales de la résidence-bunker des Petersen au cœur de Baïblanca, la taille réduite de la chambre est plutôt surprenante. Comme son dénuement, après l’abondance des œuvres d’art de toutes provenances qui tapissaient les couloirs. Des murs lisses dont on peut seulement dire qu’ils sont de couleur claire, pas de fenêtres, pas d’écrans, des armoires ou commodes dissimulées dans les murs sans relief apparent. Même le lit est un simple lit articulé comme on en trouve dans les hôpitaux – haut de gamme, il va sans dire –, entouré, mais avec discrétion, de l’indispensable matériel médical, respirateur, potence à solutés, consoles de surveillance où les divers organes de Saul Petersen affirment en régulières courbes vertes que, malgré son âge remarquable de soixante-trois ans, il n’est pas encore mort.

Fromm s’adosse dans le fauteuil en croisant les jambes, bras sur les accoudoirs. Les instructions étaient très claires : aller directement au fauteuil et s’y asseoir, ne s’approcher du lit sous aucun prétexte, attendre qu’on lui adresse la parole.

Le silence magnifie le souffle du vieil homme, lent mais régulier, unique son audible dans la pièce – la chambre se trouve au second sous-sol de la résidence, au cœur d’un labyrinthe dont on ne saurait retracer seul les méandres si l’on n’en est pas un familier. Dans la lueur diffuse d’un autre éclairage indirect, Saul Petersen semble somnoler, les yeux clos. Étonnamment, il n’a guère changé : la ligne butée de la mâchoire, le nez en bec d’aigle, la découpe dure des lèvres, les sourcils épais, blancs maintenant, au-dessus des orbites creuses, la falaise du front… Pas de cheveux – mais depuis une vingtaine d’années il avait pris l’habitude de se faire raser le crâne, sans doute pour se distinguer davantage de son père et de son grand-père, même si la ressemblance est encore frappante. Il est plus maigre qu’autrefois, mais toujours grand et massif sous le drap léger.

Fromm croise les mains sur son ventre, sans impatience. Comme il l’espérait, le vieillard a accepté de le rencontrer : “Je viens de la part de Marian Bauer” est une introduction irrésistible. Si Petersen désire garder l’initiative de la conversation, ce n’est pas un problème. Fromm a tout son temps. Ou du moins davantage de temps que le vieillard.

« Marian Bauer est partie avec Lagrange 4 », dit soudain celui-ci ; la voix est ferme et porte aisément jusqu’au fauteuil. Fromm est surpris : il aurait pensé que Petersen le ferait attendre davantage. « Je ne sache pas que la station soit revenue dans les parages, continue le vieil homme. Ni que quiconque soit en contact avec elle – surtout après vingt-huit ans.



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